David Cronenberg aurait-il perdu tout son
sens de l’humour ? C’est la question qui nous taraude à la sortie de la
projection de son nouvel opus. Déjà avec COSMOPOLIS, on avait trouvé que
le réalisateur se prenait un poil au sérieux. Mais on comprenait qu’il
faille bien une cathédrale de cinéma pour abriter et adapter l’écriture
singulière de Don DeLillo. Bizarrement, MAPS TO THE STARS cherche à
s’inscrire dans la continuité esthétique de ce précédent film alors que
les intentions des deux scénarios divergent fondamentalement. Si
COSMOPOLIS était une fable moderne, MAPS TO THE STARS est assurément une
farce. Et quoi de mieux qu’HOLLYWOOD pour faire grimacer son monde ? Le
scénario de Bruce Wagner, auteur du roman déjà farcesque « Toujours
L.A. », s’inscrit dans la droite lignée des pamphlets cyniques
américains popularisés notamment par le style de l’écrivain Bret Easton
Ellis. Tout y est exagéré, déformé, dévié pour rejouer à l’infini la
rengaine bien connue qu’Hollywood est un lieu de rêve et de damnation.
Et en l’état, la partition de Wagner est plutôt amusante tant elle
épingle cruellement, sous forme de polar torve, des silhouettes
monstrueuses de la pop culture, facilement reconnaissables. Ainsi,
difficile de ne pas voir apparaître par exemple le fantôme de Frankie
Muniz (acteur de MALCOLM) derrière ce personnage de jeune acteur névrosé
et toxico. Evidemment, la caricature va loin et Wagner pousse le trait,
s’amusant même à instaurer dans tout ça un soupçon de tragédie grecque,
façon Atrides 2.0. Alléchant n’est-il pas ? Hélas, pourquoi donc David
Cronenberg prend-il tout ça avec un tel esprit de sérieux ? Le script de
Wagner, grotesque et méchant, appelait à une mise en scène pleine
d’alacrité, qui n’aurait pas eu peur de se salir les mains dans
l’outrance. Le Cronenberg 90’s aurait donc été parfait, avec juste ce
qu’il faut de raideur pour que le délire éclate encore plus fort. C’est
cet espoir qui rend la première partie du film intrigante. Il y a
quelque chose de bizarre à voir ce scénario pop déglingué mis en scène
avec une telle austérité. Les vannes fusent dans le silence le plus
complet. On se dit que Cronenberg cultive l’étrangeté et le malaise
sûrement pour mieux lâcher les chevaux. Il n’en est rien. MAPS TO THE
STARS déplie sa noirceur et sa méchanceté morbide dans un monastère qui
vise à éteindre toutes les mèches qui pourraient s’allumer. Mécanique et
inhabité, le film accomplit sa tragédie comme on commande l’addition
pour en finir. On nous répondra que cet aspect fantomatique et ascétique
de la mise en scène sert justement un propos sur la désincarnation
d’Hollywood. Sur ce terrain-là, THE CANYONS (de Paul Schrader) est alors
nettement plus percutant. On attendait de Cronenberg un peu mieux qu’un
simple objet théorique où les acteurs sont réduits à l’état de pantins.
On a surtout la désagréable sensation que cette désincarnation du récit
sert plutôt à consolider sa stature d’auteur respecté, en agitant de
manière névrotique deux ou trois marottes, un peu éculées. Il y avait de
belles promesses dans ce scénario et une galerie d’acteurs qui se
seraient volontiers prêtés à la farce. Dommage que Cronenberg n’ait pas
retenu, pour son premier « méta-film », la leçon de ses illustres
prédécesseurs comme Altman, Minnelli ou Lynch. Il aurait su qu’Hollywood
est une chose bien trop sérieuse pour ne pas être filmé sans fantaisie.
Merci http://www.rpattzrobertpattinson.com/
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